Hélène Duclos "Les mémoires dansées"

Du 18 janvier au 03 mars 2007

En une danse secrète, l’émotion réveille le feu qui brûle à l’intérieur, aussi puissant qu’un cri muet.

Dedans ? Dehors ? Difficile à dire. Lorsque l’on regarde une toile d’Hélène Duclos, on est saisi de vertige. Ses personnages, silhouettes suggérées et pourtant si présentes, vacillent au point où, pour le funambule, l’équilibre se perd – ou se trouve.

Dans la douceur des gris, l’œil est attiré irrésistiblement par l’éclat du rouge d’une lèvre ou l’étincelle d’un feu occulte. Attiré dans ce mouvement suspendu, le regard se fait complice et scelle le mystère d’un lien secret qui l’unit à la toile : on se sent convié à une célébration, acteur d’un rituel magique ou spectateur d’une cérémonie oubliée, tel un paléontologue, témoin de scènes préhistoriques inscrites sur les parois d’une grotte. D’une toile à l’autre, on est pris dans un tourbillon, charmé par la frénésie de cette danse sur toile…

Cette expression corporelle si forte qu’elle peut évoquer parfois une forme d’exorcisme n’est pas le fruit du hasard. Elle s’ancre dans la quête spirituelle qui anime Hélène Duclos. Qu’elle s’incarne dans l’être humain ou l’animal, qu’elle soit celle de la rédemption ou de la chute, cette quête est incessante et se concrétise dans une diversité abondante. En fait, le sujet en lui-même importe peu : la pensée ne serait rien sans le langage. Que serait le corps sans ce qui l’exprime, la peinture ?

Pour Hélène Duclos, il n’existe “aucune intention première” à sa recherche d’une composition, d’une plastique. Même si elle reconnaît une certaine frénésie, une manière compulsive de travailler sans relâche, elle œuvre toujours dans un “élan maîtrisé”, mais dans un engagement total : “Je n’aime pas tricher”, dit-elle.

Ainsi, elle entame plusieurs tableaux en même temps pour que son énergie circule d’une toile à l’autre. Elle dit avec humilité, “quand je commence, je laisse venir. La matière me permet de réfléchir, de penser mon personnage, ma figure”. Mais Hélène Duclos ne se contente pas d’élaborer une simple scénographie. Confiante en la sincérité de son instinct, elle qui refuse de “travailler dans l’urgence” laisse mûrir chaque œuvre dans son esprit avant d’y revenir pour affiner sa composition, y inscrire ces “points d’attèle” qui permettront au regard de circuler dans la toile. Hélène Duclos a besoin de cette rencontre, qui donne tout son sens à son travail et apportera une nouvelle vie à sa toile. Car à l’instant précis où le regard se pose sur la toile, on entre dans une danse qui renoue avec des temps immémoriaux, quand dieux et demi-dieux faisaient résonner le monde de leurs terribles éclats de rire.

Molly Mine