Jean Michel Solvès "Moïra"
Quelle image donner de l’homme et pour quel Temps ?
Jean-Michel Solvèsa amorcé une réponse qui a pris corps de la matière. Avec les années s’est dressé le peuple hiératique et incarné de sa sculpture. Armée vigilante d’un Territoire dont les limites édictées par l’homme ne cessent d’être reconduites par celui qui pose l’énigme comme l’enjeu irréversible de son engagement.
La matière est l’arme avec laquelle la sculpture prend chair. Avec le béton, la fonte de fer, le bronze et aujourd’hui la tôle, la résine, le plâtre et le goudron, Solvès fait advenir ce qui n’a pas de visage : l’âme, la conscience, la mémoire. Pour l’arpenteur des traces initiatiques, l’empreinte est emblématique de la Vérité, le Seuil des Portes improbables.
C’est dans ce passage, trace révélée par la sculpture, que s’inscrit aujourd’hui Moria, la part, Moros, dispensée à chaque homme. Figure sans visage, celle du destin dans son Mystère incarné dans le souffle. Les Prêtresses, filles de la lumière l’ont précédée dans l’accomplissement d’une création pure.
Comme avant elles, les Mémoires, les Moria veillent dans l’atelier. Elles le quittent pour un espace interchangeable, toujours temporaire, celui de la galerie dans lequel elles poursuivent leur conversation muette. Il faut écouter ce silence vibratoire dans l’émerveillement d’une pensée en devenir.
Les Moria appartiennent au temps qui précède la connaissance, celui d’avant tout dogme et de toute soumission. Ces êtres ont accompli le voyage intérieur qui les rend à une virginité d’avant la naissance. Cet instant arrêté par Solvès est celui de la Création. L’empreinte lui donne une Présence.
Matrice, moule primitif où sont nés les mythes fondateurs, l’empreinte sur tôle et papier, absorbe et renvoie la silhouette. La Porte appelle à l’épiphanie de l’être. Sa mémoire est le réceptacle de l’âme.
Les Stylites et les Prêtresses ordonnent le cortège de l’éternité.
© Lydia Harambourg